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Discussion de groupe

Argumentaire

Le problème n’est pas le nombre des hommes mais le mode de vie. Un malien (éthiopien, africain …) consomme 40 (50, 100, 200 …) fois moins qu’un américain (français, européen…)

Sous de nombreuses variantes, cette affirmation constitue la plus fréquente des objections opposées aux partisans d’une certaine modération démographique. 


Elle présente deux atouts médiatiques : donner l’image d’une réflexion plus qualitative que quantitative, et en cela plus subtile, mais surtout placer à bon compte celui qui la professe du côté de l’humanisme et de la lutte contre la pauvreté. Hélas, sous ces atours favorables, cette position passe à côté de nombreuses réalités. 


Bien entendu, il ne s’agit de nier ni les inégalités ni les dégâts imposés à la nature du fait de consommations manifestement excessives. Mais si l’on considère que l’empreinte écologique de l’ensemble de l’humanité résulte du produit de l’empreinte individuelle moyenne par le nombre des hommes, il apparaît logique de se préoccuper des deux facteurs : nos modes de vie et nos effectifs. Aujourd’hui, la quasi-totalité du discours écologiste n’évoque que le premier de ces éléments, il est donc naturel qu’une association comme la nôtre invite à discuter également du second. 


L’appel à une solution des problèmes écologiques via la seule modification des modes de vie est en effet bien insuffisant pour plusieurs raisons. 


La première est que les modes de vie les plus gaspilleurs ne concernent aujourd’hui qu’une minorité des habitants de la planète, sans doute de l’ordre de un milliard sur les très bientôt huit milliards que comptera la Terre d’ici 2025. Appeler à la frugalité générale revient de facto à demander aux sept milliards les plus pauvres de le rester. Nous ne serons en effet jamais toujours plus riches et toujours plus nombreux sur un monde de surface finie. Si nous voulons donner plus à chacun, ce qui est bien nécessaire dans la majorité des cas, nous devons nous orienter vers une stabilisation puis une lente diminution du nombre des hommes. Cette contrainte s’impose pour des raisons physiques, aucune solution politique ne pourra la contourner. 


Par cette position, nous ne luttons pas contre les pauvres comme aimeraient le laisser penser certaines caricatures, nous luttons contre la pauvreté, c’est un combat bien différent. 


Tenons également compte du fait que les ratios d’impacts parfois évoqués (de un à cent ou même plus larges encore) sont souvent très fortement surestimés. Ils le sont évidemment pour l’alimentation pour des raisons physiologiques évidentes mais ils le sont aussi pour les autres consommations. Si l’on compare les niveaux de vie des 20 % les plus riches de la planète à ceux des 20 % les plus pauvres (ce qui est plus significatif que les cas extrêmes), les rapports d’impacts écologiques tournent plutôt autour de un à cinq. Il faudrait également tenir compte des conditions climatiques qui génèrent dans les pays du nord des besoins caloriques et des dépenses de chauffage plus importantes. 


Enfin, ces mesures d’impacts laissent généralement de côté la question de l’occupation des espaces naturels au détriment du reste du monde vivant. Même frugaux et écologiquement respectueux, dix milliards d’hommes ne peuvent concrètement vivre au milieu d’une nature sauvage. Leur seule présence suppose la disparition de nombreuses espèces et notamment de toutes celles que l’on regroupe sous le terme de mégafaune (et parmi elles, en premier lieu, celles des grands prédateurs bien évidemment). On ne retrouve d’ailleurs aujourd’hui cette mégafaune que dans les espaces largement vides d’hommes comme la Sibérie, le Canada, une partie de l’Amazonie ainsi que certains grands parcs africains. Remarquons d’ailleurs que le Canada est un pays pourtant particulièrement riche et consommateur mais qui sauvegarde ses forêts et sa faune du seul fait de sa faible densité de peuplement (de l’ordre du trentième de celle de la France). 


Récemment, le rapport Planète Vivante 2016 publié par le WWF soulignait qu’en 40 ans le nombre d’animaux vertébrés avait été divisé par deux. Remarquons que dans le même temps, c’est par deux aussi qu’a été multiplié le nombre des hommes : un même ratio, mais dans un cas une division, dans l’autre une multiplication ! Les faits sont liés.



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